Ségolène Haehnsen Kan, Plage de Normandie
Un sentiment de solitude
Un sentiment de solitude
Malgré la prédominance de teinte sable, ce paysage presque glacial est construit en diptyque, de façon à ce que chaque partie se réponde en miroir. Les nuages épais aux tons gris-noirs se vident en laissant filer de troubles traînées diagonales. Une étendue d’eau inquiétante s’approche, sa masse se divise pour encercler une ronde terre, vraisemblablement une île. De chaque côté de la toile s’élèvent des monts lacérés de glaçures. Ils restent au second plan. Devant eux, des arbres aux tortueux pieds de cèdre ou d’olivier prennent place en imposant leur feuillage foisonnant et disproportionné d’un vert émeraude. Ce monde végétal se détache du fond, appelle l’oeil, interpelle par la différence du traitement pictural quasi naïf qui lui est réservé. Les arbustes d’un ton gris clairs aux tiges fines se terminent par des épis auréolés de noir tels que des blés primaires, originels. S’agirait-il donc de la représentation d’un Eden du temps de son commencement, avant même l’arrivée de l’Homme ? Ou bien plutôt du parachèvement d’un paradis perdu, d’où l’espèce humaine aura été effacée, voire éteinte ? L’oeuvre porte pour titre « Plage de Normandie », comment le comprendre en rapport à ce qui est figuré ? Comment s’y retrouver ? Ne pas perdre pied, se rappeler alors que l’artiste peint de mémoire. Le paysage vu et retranscrit devient forcément autre.